Savez-vous vraiment rédiger une offre d’emploi ?

Tout le monde sait rédiger une offre d’emploi. Il suffit de décrire l’entreprise, le poste et le profil recherché. Sans oublier d’être attractif, complet et pourquoi pas un peu original pour vous démarquer des autres employeurs. Et voilà, votre offre est prête à être publiée… parmi les centaines de milliers d’autres déjà en ligne (plus de 800 000 en permanence sur Pôle Emploi) ! Dès lors, si vous voulez donner à vos offres toutes les chances d’être remarquées dans cet océan d’opportunités, il faut d’urgence vous familiariser avec les mécanismes qui régissent leur vie éphémère sur le web. Entre la règlementation, les algorithmes de référencement et les nouveaux comportements des candidats, la rédaction d’une offre d’emploi est peut-être moins évidente que vous ne le pensez…

Connaître la règlementation, par respect des candidats et pour vous protéger.

Peu de gens le savent, mais la publication d’offres d’emploi est strictement encadrée par la Loi. Elle est bien sûr soumise aux principes de non-discrimination (Articles L.1132-1 du Code du Travail et 225.1 du Code Pénal), mais également à des dispositions spécifiques (Articles L5331-1 à L5334-1 du Code du Travail), notamment l’interdiction de toutes mentions fausses ou pouvant induire en erreur concernant l’existence de l’emploi, sa disponibilité, sa description, sa localisation, sa rémunération et ses avantages. Les offres d’emploi doivent également être rédigées en français (ou avec une traduction en français), y compris le titre du poste, sauf pour les intitulés anglais passés dans l’usage courant comme Trader, Data Scientist ou Chief Happiness Officer, par exemple. Les offres doivent être impérativement datées et mentionner l’employeur (ou la structure de recrutement mandatée par l’employeur). Enfin, en application des dispositions de l’Article 25 de la loi du 6 janvier 1978, la collecte de données, par tout moyen frauduleux, déloyal ou illicite est interdite, ce qui concerne notamment la publication d’offres d’emploi à seule fin de constitution de fichiers de candidatures, sans poste réellement à pourvoir.

Connaître les mécanismes de référencement des offres, pour que les candidats trouvent votre offre.

La diffusion d’offres d’emploi s’effectue essentiellement sur le web, sur les plateformes d’emploi ou les sites carrière des employeurs, où elles sont recherchées par les candidats à l’aide de mots-clés pour s’afficher dans une liste de résultats sans doute longues de plusieurs pages. Et il n’est pas nécessaire de vous rappeler ce qui arrive aux offres qui n’apparaissent pas dans les premières pages de résultats… Bien sûr, la visibilité de l’offre en organique (c’est-à-dire sans frais de sponsorisation) sera avant tout déterminée par l’adéquation entre la formulation de la requête et le contenu de l’offre. Et dans une certaine mesure, par l’historique du candidat sur les plateformes qui tracent les comportement des visiteurs. Mais pour donner à vos offres les meilleures chances d’apparaître dans les premiers résultats de requêtes, et donc d’être vues, il faut aussi tenir compte des mécanismes de référencement des plateformes d’emploi (job-boards, agrégateurs d’offres, sites publics d’emploi, …). Quelques principes simples vous y aideront :

  • Sachez avant tout qu’il existe un nombre de caractères optimal pour les offres d’emploi, basé sur les comportements des candidats, lesquels ont besoin d’un minimum d’informations sur le poste mais sont vite découragés par des textes à rallonge. Entre 700 et 2000 caractères, les offres reçoivent 30% de candidature en plus (données Indeed). Si vous restez sur la fourchette basse, c’est encore mieux, les offres de 150 mots reçoivent 17,8% de postulants de plus que les offres de 450 à 600 mots (données LinkedIn) ;
  • Veillez à réduire les intitulés de poste au maximum, en gardant les précisions pour le texte de l’offre. Pensez aussi à l’affichage limité sur mobile (35 caractères maximum, soit environ 5 mots, sur Indeed par exemple) ;
  • Rédigez vos intitulés d’offres au masculin (le genre neutre en français) car les candidats le privilégient dans leurs requêtes, tout simplement. Les formulations type : « Conducteur.trice de Travaux » ou « Conducteur(trice) de Travaux », bien que vertueuses, seront dès lors moins visibles. Bien sûr, le contenu de l’offre elle-même pourra maintenir un principe d’écriture inclusive ;
  • Aérez le texte (Sauts de ligne, paragraphes courts, liste avec puces, phrases courtes) ; les blocs de texte sont moins performants en référencement. Et la lecture en sera plus agréable pour vos candidats potentiels ;
  • Utilisez l’intitulé de poste le plus connu sur le marché, qui n’est pas toujours celui utilisé en interne, et évitez les intitulés « fantaisistes » censés vous démarquer par votre originalité. Google trend (https://trends.google.com/) peut vous aider à faire le bon choix si vous hésitez entre plusieurs intitulés. Le plus populaire sera toujours le mieux référencé ;
  • Pensez à expurger vos offres des termes qui ne parlent qu’à vos salariés, comme les outils SI internes, les acronymes « maisons », les services ou les entités propres à l’entreprise, etc. ;
  • N’hésitez pas, en revanche à utiliser des mots-clés liés au poste ou à la profession, sans partir du principe qu’ils vont de soi. De la même façon, les termes techniques spécifiques (outils informatiques dédiés, normes métier, certifications, etc.) pourront aider au référencement car ils sont souvent utilisés dans les requêtes des candidats ;
  • Ajoutez la localité du poste dans la description, même si la localité apparaît ailleurs dans la trame de l’offre d’emploi. Les candidats cherchent souvent par localité dans les mots clés ;
  • Sur certaines plateformes, la mention d’une fourchette de salaire optimisera la visibilité de l’offre. De même que la possibilité d’une procédure de candidature simplifiée proposée sur certains job-boards.

Connaître les principes de rédaction de base, pour attirer l’attention des candidats et leur faire lire votre offre jusqu’au bout.

La forme, la syntaxe et le ton d’une offre d’emploi en disent beaucoup sur l’employeur. Surtout quand ils sont négligés. N’oubliez pas que vous êtes également évalués par vos candidats dès la lecture de votre offre et que votre professionnalisme transparaît à travers la qualité de votre rédactionnel.

Le poste :

  • Adoptez la forme active et adressez-vous directement aux candidats (« vous prenez en charge » et non : « le poste prend en charge ») ;
  • Veillez à la cohérence dans les temps (tous les verbes au présent), dans la syntaxe (commencez chaque ligne d’une liste par un verbe, ou par un nom, mais tenez-vous à un choix) et la forme (termes et noms entièrement en majuscule ou juste la première lettre, modèle de puces unique, …), etc. ;
  • Evitez les automatismes datés, comme cette vilaine habitude de commencer les offres par : « Rattaché à … » ou « Sous l’autorité de … », et de finir l’énumération des missions par le classique : « .. liste non exhaustive ». Nul doute que vous pouvez trouver des formules plus motivantes… ;
  • Luttez contre la propension à puiser au lexique de la contrainte vos termes pour qualifier vos missions : « vous assumez … », « vous prenez en charge …. », « vous vous efforcez de … », « en lien étroit avec … », etc. L’objectif est d’attirer les candidats, pas de les inquiéter… ;
  • Adoptez un style conforme à votre culture et ne cherchez pas à faire jeune start-up cool, qui tutoie et utilise du vocabulaire « djeuns » pour vous démarquer car le choc culturel risque d’être rude pour vos candidats si l’ambiance chez vous est plutôt cravate et vouvoiement à vie.

Le profil recherché :

  • Accompagnez la tendance à une plus grande ouverture sur le niveau ou les filières de formation requis pour laisser plus de place à l’expérience et au potentiel. Sans renoncer au niveau de formation indispensable dans un poste, veillez à ne pas reproduire les habitudes de citer certaines filières de formation ou types d’écoles, même en les faisant suivre de « par exemple » ou « etc. ». Vous ne réussirez qu’à décourager vos publics qualifiés qui ne porte pas cette étiquette ;
  • Ne renoncez pas pour autant à restreindre vos exigences sur des critères objectifs et indispensables, comme une expérience d’un certain marché ou d’un type de produit ou de service, une connaissance technique, une habilitation ou une certification, ou la maîtrise d’une langue étrangère par exemple. Un recrutement, c’est aussi l’occasion d’enrichir l’équipe et l’entreprise avec les compétences qui lui manquent. Faites simplement la part des choses entre les compétences qui vous manquent et celles que vous possédez déjà, lesquelles peuvent être transmises à vos nouvelles recrues et ne doivent pas vous priver d’intégrer des potentiels. Vous rendrez votre poste plus accessible ;
  • Abandonnez les poncifs dans les qualités recherchées, comme le « leadership », « l’autonomie » ou le « sens des initiatives », quel que soit le poste. Les qualités personnelles sont certes déterminantes, mais chaque poste mérite d’être analysé sous l’angle des soft-skills qui le caractérisent. Dès lors, chacune des qualités ou des traits de personnalité recherchés dans le poste doivent renvoyer à une réalité du poste, voire compléter sa description. Par exemple, insister sur l’autonomie ou le sens des initiatives peut être indiqué dans un poste avec peu d’accompagnement ou un management à distance, et une réelle marge de manœuvre dans les missions. De même, le leadership peut s’appliquer à un poste avec de forts enjeux de management ou de pilotage de projet. En revanche, sachez y renoncer pour vos fonctions d’exécution ou vos postes d’entrée de filière ;
  • Soyez authentique et n’omettez surtout pas les éventuelles contraintes du poste, comme les déplacements ou les astreintes, et ne survendez pas l’ampleur des projets ou les ressources allouées. C’est au contraire le moment de poser les conditions objectives du poste et de faire en sorte de n’attirer que des candidatures conscientes et adaptées.

Connaître les attentes de vos candidats cibles, pour les faire postuler à votre offre.

Les candidats ne sont plus uniquement à la recherche d’un poste, mais aussi d’un employeur. Quand le marché leur est favorable, ils sont même en position de choisir leur employeur parmi plusieurs opportunités de postes équivalentes et adoptent volontiers des postures de clients en pesant les arguments de chacun et en croisant des avis sur le web. Ils vont donc vouloir aller au-delà du poste et sonder, dès l’offre d’emploi, l’intérêt d’un employeur en termes d’expérience collaborateurs et de culture d’entreprise. Vous l’aurez compris, il vous faudra renoncer à la formule classique : « Entreprise leader sur son secteur », avec l’effectif et le chiffre d’affaires comme unique arguments ! 

  • Donnez du sens à votre recrutement. A quel besoin répond ce poste, quelle est sa contribution, dans quel objectif global d’entreprise s’inscrit-il ? Prenez également la peine de raconter le poste et son contexte, ne vous contentez pas d’énumérer une liste de missions, de responsabilités et d’objectifs chiffrés. Evoquez l’ambiance de travail, la culture managériale, l’opportunité de contribuer à la construction de quelque chose de significatif, de servir une cause, d’avoir un impact dans la vie de l’entreprise, toutes ces choses qui donnent vraiment envie de postuler finalement. Un job c’est aussi une opportunité de se réaliser et de s’épanouir. Ne sous-estimez pas la force de ces arguments ;
  • Mettez-vous au diapason de l’époque et intégrez les nouvelles attentes du marché des candidats, notamment en matière d’engagements sociétaux et environnementaux. L’affirmation d’une culture inclusive, la mise en avant d’initiatives généreuses ou la manière dont vous intégrer les enjeux écologiques dans vos activités, trouvent de plus en plus écho dans la population de candidats potentiels, et pas uniquement chez les jeunes générations ;
  • N’oubliez pas que vos candidats ont les mêmes préoccupations quotidiennes que vous. Même passionnés par leur travail ils demeurent sensibles aux argument d’équilibre vie pro et vie perso, aux avantages sociaux, à la rémunération et aux perspectives de développement professionnel. Autant d’arguments longtemps bannis des entretiens d’embauche mais que l’ère du temps a remis au goût du jour et même rendus déterminants sur un marché des talents de plus en plus tendu. Si vous le pouvez, précisez les avantages que vous offrez, comme un 13ème mois, un véhicule de fonction, des primes, une participation/intéressement, une mutuelle ou du télétravail. Le mot clé « télétravail » est d’ailleurs de plus en plus fréquemment utilisé pour filtrer des offres… ;
  • Aidez vos candidats à se projeter dans l’entreprise, en commençant par décrire le processus de recrutement lui-même, puis les modalités d’intégration, vos éventuels programmes de tutorat/mentorat et au-delà, votre politique de formation, de mobilité et de carrière. Ces thématiques, encore peu abordées dans les offres d’emploi, vous distingueront efficacement des autres employeurs ;
  • Mettez-vous au « nudge » ! La décision de postuler ou non se jouant en grande partie à la lecture de l’offre d’emploi, la manière dont vous la rédigez en termes de choix de vocabulaire, de critères de sélection ou d’atouts d’entreprises a une influence déterminante sur vos publics de candidats potentiels. Alors que beaucoup d’entreprises cherchent à attirer davantage de candidatures féminines par exemple, notamment sur les filières techniques, de nombreuses études montrent que certains automatismes dans la rédaction des offres tendent à décourager les femmes de postuler. Il ne s’agit pas seulement d’adopter l’écriture inclusive ou de montrer des femmes dans les visuels de recrutement. Il faut remettre en question nos habitudes de rédiger des offres avec de longues listes d’exigences, des critères exclusivement techniques, ou un vocabulaire « martial » (très développé dans l’entreprise : « conquête », « campagnes », « cibles », etc.), qui parlent davantage à un public masculin. Dans le contenu également, la manière aussi dont vous présentez les enjeux du poste ou l’entreprise n’est pas neutre sur la perception des candidats et le fait de veiller à intégrer des indications de culture d’entreprise (bienveillance, dynamique collaborative, etc.), des enjeux relationnels dans les missions, des qualités de savoir-être dans le profil recherché ou les perspectives d’évolution au-delà du poste, par exemple, sont de nature à encourager toutes les candidatures, des femmes comme des hommes, des débutants comme des expérimentés. Dans un contexte de pénurie de candidats qualifiés, il faut se soucier d’être attractif auprès de l’ensemble de son public.

Les offres d’emploi sont de loin le premier canal de sourcing des employeurs, avec près de 90% des postes à pourvoir publiés en ligne. Elles représentent souvent le budget de recrutement le plus important pour les gros employeurs, auxquels s’ajoutent des investissements croissants en marque employeur et en expérience candidats. A côté de ces débauches de moyens pour rendre les offres d’emploi accessibles, leur contenu et leur forme restent étonnamment négligés. On en abandonne souvent la rédaction au recruteur, sur la base d’une fiche de poste qui ne s’y prête pas toujours, ou on réplique des modèles d’offres standardisés et rarement mis à jour, comme si finalement ce que l’on donnait à lire aux candidats n’avait pas d’importance. Pourtant, c’est indiscutablement la lecture d’une offre d’emploi qui détermine l’acte de candidature, même si beaucoup de candidats font un détour par le site web de l’employeur ou sur Wikipédia pour confirmer leur intérêt avant de postuler. Quand vous considérez objectivement le rapport effort / gain potentiel, le travail sur le contenu de l’offre est l’investissement le plus avisé que vous puissiez faire pour améliorer la performance de vos offres d’emploi. Les leviers d’optimisation sont simples, gratuits et à la portée de chacun. Et si vous n’êtes pas encore tout à fait convaincu, rappelez-vous qu’au-delà même de l’enjeu de recrutement, les offres d’emploi recouvrent aussi un enjeu d’image. Par leur volume et leur visibilité permanente, elles sont, de fait, des relais de communication bon marché et efficaces pour diffuser une marque employeur, et pourquoi pas, faire connaître l’entreprise et son activité sous un jour positif. Pour beaucoup d’entreprises à taille humaine, peu présentes sur le web, c’est même le principal vecteur d’image. Autant de bonnes raisons de vous demander si vous savez vraiment rédiger une offre d’emploi.

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